CHARBEL SAAD

Les images numineuses, Installation photo-sonore, 300 x 200 cm, 2022

Le concept numineux a été élaboré par Rudolf Otto en 1917, dans son ouvrage intitulé Le Sacré (1). Il l’avait défini comme une étrange expérience affective du sacré qui fait naître en l’être qui la subit une attitude paradoxale. D’une part naît un sentiment d’effroi, de crainte, de terreur sacrée – sentiment écrasant que R. Otto désigne comme mysterium tremendum -, d’autre part s’impose le sentiment d’une attraction irrésistible, d’un arrachement de la vie ordinaire, d’une urgence de “voir” au risque de “mourir”, sentiment irrépressible que Otto définit comme mysterium fascinans. Rudolf Otto a nommé cette ambivalence extrême de l’expérience du sacré numineuse (2).

Ce travail explore un album de 23 photographies argentiques que j’ai prises en tant que jeune adolescent pendant l’été 2002. Cet album présente des paysages et des images prises dans la vallée Qadisha à quelques pas de ma ville natale de Bcharré au Liban. Cette vallée, située à 35 km de la mer Méditerranée, a gardé son nom d’origine syriaque ancien où “qadisha” signifie “sacrée”. Depuis 1998, cette vallée sacralisée est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Mon intérêt dans ce travail est d’explorer la question du sacré dans l’art numérique. Après avoir numérisé cet album de souvenirs dans un premier temps, je profite de la malléabilité de l’image numérique et lumineuse pour questionner sa matérialité. Dans cet assemblage de prises de vues, j’interroge les liens entre sacré et profane à travers leurs représentations, tout en me plongeant dans ma propre enfance soumise à un héritage religieux catholique oriental.

  1.  Rudolf Otto. Le Sacré – L’Élément non-rationnel dans l’Idée du Divin, et sa relation avec le rationnel. Traduction française par André Jundt. Payot, Paris, 1929
  2.  Alain Delaunay, NUMINEUX – Encyclopædia Universalis. https://www.universalis.fr/encyclopedie/numineux/. Consulté le 26/03/2022.

VICTORIA QUIRING

Spatio-Spectral, Système holographique et miroirs noirs, dimensions variables, 2022

L’ère numérique fait apparaître depuis quelques années de nouvelles façons d’appréhender la mort. On observe des intelligences artificielles qui s’expriment comme votre disparu, tel le Dadbot de James Vlahos (2016) ou bien encore des robots de deuil, tel le Digital Shaman project, créé par l’artiste Etsuko Ichihara (2018). Ainsi évoluent les pratiques de deuil.

Mon travail interroge les croyances populaires et plus précisément celles qui traitent de la mort. L’installation Spatio-Spectral  explore une nouvelle forme de mausolée numérique par le biais du salon funéraire. Cette installation holographique, accompagnée de miroirs, dessine un espace entièrement dédié au recueillement auprès de l’âme du disparu, sans tenir compte du corps physique de ce dernier. J’ai donc choisi de travailler avec la forme sphérique et bleutée du feu follet dont l’anglicisme, ghost-lights – traduit littéralement par lumières de fantômes -, montre clairement la volonté de travailler avec cette iconographie.

Dans les anciennes croyances françaises, le feu follet se présente comme une âme en peine qui a besoin de prières pour sortir du purgatoire. De nos jours, les feux follets sont perçus comme les “gardiens des tombes ». Ces apparitions égayent les sépultures et donnent de la joie à ceux qui en ont le plus besoin. C’est avec cette iconographie que j’ai choisi de travailler pour représenter une image rassurante de l’âme de nos êtres aimés.

Réalisé en binôme avec Mathilda Le Coq, étudiante à Polytech’Lille, dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.

HONG QU

Attractions, Installation interactive, vidéoprojection, kinect, ordinateur, 2 x 3 m, 2022

Mon travail explore la notion de force gravitationnelle. Il interroge l’attraction mutuelle entre les corps et les objets. Par exemple, la marée est le résultat de l’attraction exercée par la lune et le soleil. Nous sommes tous soumis à la force gravitationnelle, mais cette loi nous est invisible. 

Attractions est une installation interactive : les mouvements des spectateurs conduisent à une modification de la vidéo. Dans un premier temps, le spectateur perçoit des mots : Attractions, Océan, Lune, Marré, Visible, Force, Créatures, Mondes et Reflux. En levant sa main, il choisit librement de sélectionner trois mots. Le parcours de son mouvement est enregistré sur la projection. Le principe est d’utiliser l’environnement réel et virtuel pour faire interagir le spectateur. S’ouvre alors une vidéo faite d’une superposition de trois films auxquels s’ajoute la captation directe de l’image du spectateur : voir le monde, tout voir et se voir soi-même.

Ces vidéos varient selon les mots sélectionnés. Il y a autant de possibilités qu’il y a de mouvements du spectateur. Les  environnements filmés, liés à la nature ou aux mouvements sociaux, évoquent à leur manière la force gravitationnelle qui nous entoure et nous définit.

La gravitation impacte la terre, tout comme nos choix et nos comportements impactent le monde. Cette installation traite à sa manière de l’Anthropocène.

Attractions a été pour une part développée avec Nicolas Thieblin dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.

ANNAËLLE OESTREICH – STEPHANE CABÉE

Anemo, Installation, ventilateurs, vent, dimensions variables, 2020-2022

Dans ma démarche, j’explore les formes intangibles, invisibles ou liquides telles que l’eau, le son et l’air, qui sont mes médiums principaux. Ils sont utilisés comme une tentative de reconnexion de l’humain avec son environnement par des biais technologiques comme des installations sonores ou mécaniques. Tout cela dans une esthétique minimaliste, aux moyens d’expressions réduits au maximum. 

Anemo est une installation composée d’un ventilateur, soufflant en temps réel le vent de Dunkerque. Cette pièce permet au spectateur dans l’espace d’exposition de se connecter d’une façon ou d’une autre au littoral.

Anemo est une réflexion sur le terme «inspiration» dans sa double acception : défini à la fois comme un souffle créateur artistique et une bouffée d’air dans les poumons. Ce projet, travaillé sur presque deux ans, a été réfléchi lors des différentes périodes de confinement, durant lesquelles nos relations avec notre environnement ont été réduites et repensées.

Inspirée par mon environnement, par la mer et par le vent, il m’a fallu repenser les façons de me rendre sur ma principale source d’inspiration : la mer de Dunkerque. C’était donc en me connectant sur les différents sites de webcam filmant la mer de Dunkerque en direct, de relevés de vitesse de vent ou de coefficients de marées que je restais «connectée» et attentive à mon environnement depuis mon bureau lillois.

Ce projet a été réalisé en collaboration avec Stéphane Cabée, et Manon Guegan dans le cadre du

Dans ma démarche, j’explore les formes intangibles, invisibles ou liquides telles que l’eau, le son et l’air, qui sont mes médiums principaux. Ils sont utilisés comme une tentative de reconnexion de l’humain avec son environnement par des biais technologiques comme des installations sonores ou mécaniques. Tout cela dans une esthétique minimaliste, aux moyens d’expressions réduits au maximum. 

Anemo se présente une installation composée d’un ventilateur, soufflant en temps réel le vent de Dunkerque. Cette pièce permet au spectateur dans l’espace d’exposition de se connecter d’une façon ou d’une autre au littoral.

Anemo est une réflexion sur le terme «inspiration» dans sa double acception : défini à la fois comme un souffle créateur artistique et une bouffée d’air dans les poumons. Ce projet travaillé sur presque deux ans a été réfléchi lors des différentes périodes de confinement, durant lesquelles nos relations avec notre environnement ont été réduites et repensées.

Inspirée par mon environnement, par la mer et par le vent, il m’a fallu repenser les façons de me rendre sur ma principale source d’inspiration : la mer de Dunkerque. C’était donc en me connectant sur les différents sites de webcam filmant la mer de Dunkerque en direct, de relevés de vitesse de vent ou de coefficients de marées que je restais «connectée» et attentive à mon environnement depuis mon bureau lillois.

Ce projet a été réalisé en collaboration avec Stéphane Cabée, et Manon Guegan dans le cadre du

Dans ma démarche, j’explore les formes intangibles, invisibles ou liquides telles que l’eau, le son et l’air, qui sont mes médiums principaux. Ils sont utilisés comme une tentative de reconnexion de l’humain avec son environnement par des biais technologiques comme des installations sonores ou mécaniques. Tout cela dans une esthétique minimaliste, aux moyens d’expressions réduits au maximum. 

Anemo se présente une installation composée d’un ventilateur, soufflant en temps réel le vent de Dunkerque. Cette pièce permet au spectateur dans l’espace d’exposition de se connecter d’une façon ou d’une autre au littoral.

Anemo est une réflexion sur le terme «inspiration» dans sa double acception : défini à la fois comme un souffle créateur artistique et une bouffée d’air dans les poumons. Ce projet travaillé sur presque deux ans a été réfléchi lors des différentes périodes de confinement, durant lesquelles nos relations avec notre environnement ont été réduites et repensées.

Inspirée par mon environnement, par la mer et par le vent, il m’a fallu repenser les façons de me rendre sur ma principale source d’inspiration : la mer de Dunkerque. C’était donc en me connectant sur les différents sites de webcam filmant la mer de Dunkerque en direct, de relevés de vitesse de vent ou de coefficients de marées que je restais «connectée» et attentive à mon environnement depuis mon bureau lillois.

Ce projet a été réalisé en collaboration avec Stéphane Cabée, et Manon Guegan dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.

ANNAËLLE OESTREICH

Il vit dans l’obscurité, Installation lumineuse et sonore, dimensions variables, 2022

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Il vit dans l’obscurité. 

Silence clair où il tâtonne avec certitude. 

Dans l’intimité de sa chambre noire, ses icônes intérieures communiquent avec le regard des autres. 

Son regard porte loin. Derrière le voile noir reposant sur son nez, c’est au-delà du visible qu’il se pose. Un œil cligne et retentit le clac de l’appareil, il vient enregistrer ce point de lumière et de chaleur. Silence atroce et impossible des images.

Il parle beaucoup pour occuper l’espace, mais paraît si serein dans le silence. De la couleur il n’a plus que le souvenir, de la lumière plus que la chaleur. De l’azur, du doré, du carmin, plus que l’impression dans son esprit de la jupe plissée, douce et volante dans le vide.

Il vit dans l’obscurité est une installation sonore et lumineuse inspirée par le travail et la vie d’Evgen Bavcar, philosophe et photographe aveugle. Au premier coup d’œil, il peut sembler que ce néon grésillant est simplement défectueux, il peut attirer l’œil ou brouiller la lecture de l’exposition plongée dans le noir. 

Dans une volonté d’interprétation du texte qui ne passe pas par la lecture, j’ai traduit en morse ce texte lui rendant hommage. Le néon s’allume quelques secondes, puis s’éteint, tout cela accompagné d’un grésillement retentissant au rythme de la lumière. 

« Mes images sont fragiles. Je ne les ai jamais vues, mais je sais qu’elles existent et certaines m’ont beaucoup ému », écrit Evgen Bavcar dans Le Voyeur Absolu, en 1992.

HSIAO-MEI HSU

L’âge de la jeunesse, Installation vidéo, plaque Plexiglas, film sans tain, tissu, éclairage, dimensions variables, 2022

Une partie de l’histoire de la région du Nord de la France est marquée par l’émergence et la fermeture de l’industrie textile. Plusieurs générations ont été marquées par cette industrie. Une partie de l’Esä a été construite sur un ancien bâtiment d’une filature. Auparavant, les ouvrières textile travaillaient dans ce bâtiment aujourd’hui occupé par de jeunes artistes.  Par ce projet, je propose une rencontre entre ces générations à travers le temps.

À partir des archives photographiques de la filature Le Blan à Lille, j’ai sélectionné des images de jeunes travailleuses et travailleurs, dont le regard m’intéressait. Ces portraits ont  ensuite été édités pour former un groupe sur un fond noir. Grâce au logiciel Deep Nostalgia™, leurs regards sont légèrement animés. 

L’animation est projetée en taille réelle sur un téléviseur devant un miroir sans tain.  Quand un visiteur lui fait face, la nature semi-réfléchissante de ce miroir lui permet d’observer à la fois l’image et son reflet. Je propose par cette installation un moment bref de rencontre avec cette génération précédente. C’est un échange à travers nos regards et nos corps. Il s’agit ici de proposer de porter un regard sur les travailleuses et travailleurs qui ont vécu et habité ce lieu avant nous.

Cette installation a été pour une part développée avec Antonin Rival dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.

Source des images : Archives nationales du monde du travail, Roubaix, côte 1989 9.

YULIYA MAKOGON

Les ombres de cette forêt, Installation vidéo, rideaux de fil, 200 x 200 x 200 cm, 2022


Les ombres de cette forêt est une vidéo de dix minutes qui se présente sous la forme d’une installation immersive. La vidéo met en scène une promenade dans une forêt ukrainienne. Cette promenade suit un personnage principal qui entre dans un monde fictif où il est accueilli de manière peu amicale par une créature issue de la mythologie slave : une Mavka. La Mavka est un être représentant l’esprit d’une jeune fille morte avant d’avoir été baptisée. Comme elle ne bénéficie pas de la protection divine, elle vit sous la garde des habitants de la forêt.  

Cette installation se compose d’une piste sonore et d’une vidéo projetée sur des cordes de nylon suspendues à une armature spiroïdale accrochée au plafond. Au milieu de la vidéo, les cercles commencent à tourner. Grâce à cette structure, la projection devient tridimensionnelle et le visiteur peut entrer à l’intérieur de l’installation.

L’idée de cette installation procède de l’envie de traiter des mondes réels, fictifs ou mythologiques, qui se rencontrent et vivent en parallèle. Ils se mélangent aussi, faisant de la réalité un phénomène en mutation qui n’existe pas en soi mais dont la substance est en constante création. 

Réalisée en collaboration avec Amina Fangouri, dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.

PAUL KRULIC

Transversal, Profils métalliques, briques et impression, 180 x 180 cm, 2022

Transversal est une installation composée d’une sculpture métallique, faite de tubes, ainsi que d’une impression sur tarlatane, un tissu léger à la maille visible.

Ce projet s’ancre autour d’un concept, formulé par Paul Virilio et Claude Parent, celui de concevoir une architecture critique oblique, c’est-à-dire se situant entre la verticalité du bâtiment et son horizontalité. L’impression du tissu prend place sur la sculpture ; par cet accueil, celle-ci devient structure. Cette impression est une grille simple, gravée sur bois grâce à une découpeuse laser puis imprimée sur la tarlatane. Elle offre au spectateur une possibilité, celle d’arranger et de modifier à sa guise cette architecture nouvellement montée, ne tendant plus à avoir la prétention de s’ériger vers les cieux mais de rester sur terre, à échelle humaine. 

 Ce projet s’ancre autour de pratiques numériques. Il emprunte les outils de la photogrammétrie ainsi que ceux de la modélisation 3D pour les intégrer au monde physique. Cette inclusion d’éléments numériques, impalpables dans leur utilité initiale, rendent compte également d’une réalité autre, celle qui confère aux spectateurs de ces grandes villes le pouvoir d’agencer les bâtisses à leur guise.

ALEXANDRE KIEBER

Enchevêtrement computationnel #2

Installation vidéo interactive, cube en métal, toile de fond photographique, films miroir sans teint, caméra 4K, 3 vidéoprojecteurs, ordinateur, environ 2m x 2m x 2m, 2022

Cette installation vidéo interactive a été pensée en continuité de celle présentée l’année précédente lors de l’exposition PRIST, Dé-réalité, Des réalités. Cette fois-ci, à l’intérieur d’un cube, il s’agit d’explorer l’évolution de notre rapport à l’espace et au temps, par la mise en abîme de l’environnement artistique. En entrant dans celui-ci, l’interacteur, comme le dit Miguel Chevalier, verra son image démultipliée à l’infinie, tel un enchevêtrement de structures gigognes. Ces dimensions mésoscopiques dans lesquelles nous nous trouvons sont ici suggérées, dans le but de créer un pont éphémère entre les différentes modalités de la matière. À l’image de la fenêtre albertienne, cette CAVE tente de réactualiser la notion de mimesis, à l’ère des méta-mondes en gestation. Dans le mouvement d’absorption de l’identité du visiteur vers un ailleurs, il est également question de transcender ses perceptions, pour lui faire imaginer une succession de lieux immatériels.

JULIE EVERAERT

Lycogala, Installation interactive et virtuelle, fils PLA, casque Oculus Quest 2, 40 x 30 cm environ, 2022

Lycogala renvoie à une espèce de myxomycètes. L’œuvre est réalisée à l’aide de la technique d’impression 3D et de la réalité virtuelle.

Elle se compose d’une impression 3D à laquelle s’ajoute une représentation modélisée d’un champignon, le lycogala. Muni d’un casque VR, le spectateur interagit avec Lycogala, au sein du monde réel et du monde virtuel. Selon ses gestes, sa position et ses mouvements, différentes animations évoquant la naissance et la prolifération des Lycogala se lancent.

Le but est de conférer à l’objet 3D représentant le champignon une impression qui relève du vivant, en jouant sur la texture, la forme et la lumière. Il s’agit de questionner la frontière entre réel et imaginaire, entre mimétisme et monde onirique. Lycogala vient interroger notre rapport à la réalité et à la simulation, à travers des objets transitionnels situés à la frontière entre les deux. Entre narration et fiction, Lycogala se joue des différentes réalités, biologiques, humaines et mathématiques.

Sur le plan scientifique, le lycogala est une espèce de champignons faisant partie de la classe des myxomycètes. Il se compose de petites boules, les aethalia, qui vont du rose au brun. Elles peuvent sécréter un liquide visqueux orangé si leur paroi est rompue avant la fructification. Elles se déplacent sous forme de petites plasmodes rosées pour se nourrir de bactéries, de plantes, de levures et de spores. Lycogala souligne cette phase de développement rarement observée à l’œil nu.

Installation réalisée en collaboration avec Mel Baumgartner, dans le cadre du Module de co-création Arts et Sciences,  Polytech’Lille-Esä.